CECI n'est pas EXECUTE 28 décembre 1858

Année 1858 |

28 décembre 1858

Alfred de Falloux à Charles de Montalembert

Tours, 28 décembre 1858,

Cher ami, je ne veux pas quitter Tours sans vous dire que mes entretiens iront dépasser toute espérance. Là enfin il y a un caractère, une intelligence et une pureté1. J’omets tout ce qui a eu trait à la situation générale sinon que vous devez mettre plus de vigilance que jamais par vous-même et et par votre cher gendre à conjurer toute publicité de la lettre de Rennes. La voilà désormais en bonnes mains et en bon chemin ; n’agissons donc pas comme des désespérés qui n’ont plus qu’à faire sauter la Sainte-Barbe2.

J’insiste au même point de vue sur la discrétion absolue relativement à ce que je vous laisse entrevoir ici, sauf avec Cochin qui s’en sentira fortifié pour l’éminente entrevue qu’il se disposait à rechercher.

J’en viens maintenant à ce qui vous touchent personnellement, cher ami. Je me suis de nouveau convaincu que tout ce qui a cœur et âme dans le clergé vous reste sincèrement uni et que du jour que vous pourrez reprendre de votre côté le grand terrain religieux on se fera joie et honneur de vous y rejoindre et de vous y soutenir. On m’a parlé avec effusion dans ce sens ; on a pris plaisir à louer et à analyser dans toutes ces beautés l’article sur Saint-Benoît3, on s’est enquis avec une extrême sollicitude de l’apparition impatiemment attendue de l’ouvrage tout entier ; croyez-en donc bien là-dessus, cher ami, votre propre mouvement et l’instinct de ce qui vous aime ! Ne laissez quoi que ce soit prendre désormais le pas sur ce grand œuvre qui sera à la fois le rajeunissement et le développement de votre magnifique mission parmi nous. On m’a parlé aussi avec la plus haute justice d’A[lbert de Broglie] et du mérite qu’il avait eu à ne pas perdre patience devant les absurdes et coupables attaques dont il avait été l’objet ; si vous pensez que ce suffrage puisse lui être agréable, faites le lui passer en l’assurant de mon plus vrai et de mon plus fidèle attachement. Mon mauvais secrétaire vous portera de vive voix d’ici à quelques jours quelques autres détails qui vous concernent encore ; renvoyez moi aussi par lui quelques renseignements sur tout ce que vous me savez me tenir si fort à cœur.

Je vous embrasse en mémoire toute spéciale de notre dernier petit adieu dans la cour de l’intendance.

Alfred

1Falloux était allé s’entretenir avec l’archevêque de Tours, Mgr Guibert.

Guibert, Joseph-Hippolyte (1802-1886), évêque de Viviers, il avait été nommé à l’archevêché de Tours le 4 février 1857. Plutôt gallican à l’origine, il ne montra guère de sympathie pour l’Univers. Il fut nommé archevêque de Paris en 1871.

2Sainte-Barbe est la patronne des sapeur-pompiers.

3L’article paru dans Le Correspondant intitulé Saint-Benoît est un fragment de l’ouvrage Moines d’occident que Montalembert fera paraître en 1860.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «28 décembre 1858», correspondance-falloux [En ligne], Année 1852-1870, Second Empire, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1858,mis à jour le : 23/03/2021