CECI n'est pas EXECUTE 27 juin 1885

1885 |

27 juin 1885

Arthur de Cumont à Alfred de Falloux

 

La Bodière1, 7 juin 1885

Cher ami,

Depuis votre départ d’Angers, Je n’ai pour ainsi dire passer ces un seuls jours de souffrir et d’être le plus misérable des hommes. Cependant une médication nouvelle et énergique, commencée le 1er juillet, m’apporte quelque soulagement. Je dis soulagement, car je ne crois guère à la guérison. Mon mal est une inflammation de l’aorte causée par le rhumatisme, et l’aorte est le grand canal qui, soudé directement au cœur, charrie le sang et le fournit aux veines, lesquelles à leur tour le distribuent dans toutes les parties du corps. Le petit aperçu vous permet de comprendre la gravité de mon état, et vous explique pourquoi les crises qui se succèdent par intervalles me causent, avec les douleurs les plus aiguës, l’anxiété la plus cruelle. Cependant Farge qui plaide les circonstances atténuantes, affirme que jusqu’à ce moment, je n’ai aucune lésion au cœur. Amen ! Son intention est bonne et je lui en sais gré. Mais, mon pauvre cher ami, vous jugez si dans cette lutte contre des tortures sans cesse renaissantes, il m’a été possible de m’occuper de politique et de prendre part aux discussions du comité. Que font-ils ? que disent-ils ? Que préparent-ils. De quelles manœuvres plus ou moins souterraines et plus ou moins loyales nos deux mouches du coche se livrent-elles ? Je l’ignore absolument. Dimanche prochain, 12 juillet, une réunion privée doit avoir lieu à la salle Chauveau2 pour arrêter sa liste, et, en outre, le même jour à neuf heures le comité tiendra séance chez Joubert3. Cette séance ne peut manquer d’être important puisque les dernières résolutions y seront prises. Si les poisons dont je m’abreuve me rendent, au moins momentanément, assez de force pour y assister, je ne laisserai pas, vous pouvez le croire, entamer notre programme ? Dès le lendemain, je vous rendrai compte des deux réunions et de leurs résultats. Serez-vous encore à Bagnoles4? Arthur ayant désiré venir passer quelques jours à La Bodière, je n’ai pas voulu lui refuser cette distraction, et je me suis fait traîner péniblement jusqu’ici. La semaine prochaine je serai de retour à l’Épinay5.

Adieu, cher ami. Je suis bien heureux des bons effets des autres sur votre santé. Quand vous pourrez m’écrire, faites-le c’est ma seule joie. Je vous embrasse tendrement.

A. de Cumont

1Château de La Bodière, propriété d’Arthur de Cumont, à Saint-Lambert du Lattay, en Maine-et-Loire.

2Voir lettre du 7 juillet 1885 du même au même.

3Joubert André (1847-1891), collaborateur du Correspondant de 1869 à 1880 et de plusieurs revues d'Anjou.

4Bagnoles-de-l’Orne, station thermale de Normandie.

5Château de l’Epinay, domaine d’Arthur de Cumont, à Saint-Georges sur Loire (Maine-et-Loire).


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «27 juin 1885», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1885,mis à jour le : 24/04/2021