Année 1853 |
21 septembre 1853
Léon Faucher à Alfred de Falloux
Biarritz, le 21 septembre 1853
Mon cher ancien collègue,
Au moment de rentrer à Paris, je lis dans le Constitutionnel que vous venez d’échapper à un accident1 qui pourrait avoir pour vous les conséquences les plus graves. Les termes de cet article ne me rassurent pas complètement ; et je serais heureux d’apprendre qu’il n’en est résulté ni commotions ni blessures. Je sais que la résignation ne vous manque pas plus dans ces épreuves de chaque jour que le courage dans les circonstances difficiles. Mais il est permis à ceux qui vous aiment de se préoccuper de tout ce qui peut ébranler une santé qui a besoin de ménagement.
Après avoir couru les Pyrénées pour mon propre compte, je suis venu ici pour la santé de ma femme qui se trouve à merveille des bains de mer. La prévoyance est surtout de saison dans le loisir et dans la retraite. Il y aura peut-être quelques jours une tribune en France ; pour cet avenir, quelque éloignée qu’il puisse être, je ne veut pas laisser s’éteindre ma voix.
Je n’ai jamais joui d’une meilleure santé ; et je n’ai jamais moins employé mes forces. Cette inaction me pèse chaque jour davantage ; mais je considère avec une tristesse bien autrement profonde l’état moral du pays. Tous les maux peuvent se guérir, excepté l’abaissement qui est sans remède.
Mais j’oublie que je ne voulais pas vous parler d’autre chose que de votre santé dont je vous saurais gré de me donner des nouvelles. Nous partons demain pour Paris. Veuillez présenter à Madame de Falloux mes respectueux hommages, et agréez, la nouvelle assurance de mes sentiments affectueux.
Léon Faucher
1Quelques jours plus tôt Falloux avait été victime d’un accident de charrette qui s’avéra en définitive sans gravité.
