CECI n'est pas EXECUTE 29 décembre 1869

Année 1869 |

29 décembre 1869

Alfred de Falloux à Charles de Montalembert

Bourg d’Iré, 29 décembre 1869

Très cher ami,

Vous ne vous serez pas mépris sur mon silence, et vous ne vous méprendrez pas aujourd’hui sur ma brièveté.

Depuis un mois, je n’ai pas cessé d’être aux prises avec un redoublement de souffrances et depuis dix jours j’ai joint une lutte pleine d’angoisse avec les électeurs M. de Sainte-Hermine1. Les Vendéens qui n’ont pas l’habitude de voir de près ce sont obstinés à me demander une seconde campagne électorale2, j’ai refusé avec une énergique conviction, j’ai tout tenté pour leur faire agréer un meilleur choix, soit un habitant de leur propre pays, soit Cochin, s’il voulaient un homme de tribune. Rien n’a pu vaincre leur résistance, et après mon troisième refus écrit j’ai, vu arriver au bout dirai une députation de six personnes. Ne me demandant que ma procuration, et consentant à laisser ma personne dans le lit, où elle me trouvait. J’ai été vaincu dans mon dernier retranchement, j’ai dicté à la hâte une circulaire quelconque, et ils sont partis plein d’espoir du succès, et moi me flattant bien d’un échec. Mon mal est hélas, moins grand que le vôtre, cher ami, mais il est plus incompatible encore avec la vie publique et avec la guérison. C’est la certitude du mécompte, que je causerais qui a fini par m’attacher complètement à la retraite. Enfin voilà de nouveau mon pauvre dé jeté et je voudrais bien que vous l’apprissiez par mois avant de le lire dans le journal. Votre pensée m’est toujours bien présente, mais jamais plus que quand il s’agit de combattre, et rien ne m’enlève la conviction que vous reprendrez bientôt vos armes et le commandement de notre bataille plus dévoué que jamais à son général.

Les nouvelles de Rome ne sont pas brillantes, mais l’évêque d’Orléans3 n’en est pas moins le drapeau de l’élite de l’épiscopat, et une telle minorité ne s’escamote pas dans un concile comme dans une soupière de village. Je vous embrasse bien des fois, cher ami, avec bien des vœux dont vous connaissez mieux que personne le but, l’intensité et la fidélité.

Alfred

1Sainte-Hermine, Élie Jean Émile de (1809-1870), homme politique, neveu d’un ancien préfet de la Vendée. Orléaniste, il se rallia à Louis-Napoléon et se montra partisan du coup d'état ; il se présenta à la députation dans la Ière circonscription de Vendée dés 1852 et sera constamment réélu jusqu'en 1869. Mais son élection de 1869 ayant été invalidée, le 9 décembre 1870, il sera remplacé par le baron Alquier.

2Après un premier échec aux élections générales de mai 1869 où il avait été battu par le candidat officiel, M. de La Poèze (dans la circonscription de Napoléon-Vendée, Falloux fut sollicité pour se porter à nouveau candidat en Vendée, dans la circonscription des Sables d'Olonne lors d'une élection partielle du 9 janvier 1870. Ayant renoncé à se déplacer dans cette circonscription en raison de ses ennuis de santé, vivement combattu par l'administration locale, Falloux échouera une nouvelle fois. Il obtiendra malgré tout un score plus qu'honorable, 12.250 suffrages, s'inclinant de quelques centaines de voix à peine face à son concurrent qui l'emporta avec 12.757 voix.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «29 décembre 1869», correspondance-falloux [En ligne], Année 1869, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Année 1852-1870, Second Empire,mis à jour le : 31/01/2022