CECI n'est pas EXECUTE 18 septembre 1867

Année 1867 |

18 septembre 1867

Clothilde de La Ferté-Meung à Alfred de Falloux

Au Marais (Paris), 18 septembre 1867

Cher Monsieur, le témoignage si vrai, si affectueux de votre sympathie prend place dans mon cœur et le relève, pour quelques instants du moins, de ce morne abattement qui succède à l’abondance des larmes.

Vous l’avez compris, quand j’ai voulu vous serrer la main et m’appuyer sur votre compassion alors que toute espérance s’était évanouie, je sentais combien votre amitié m’était précieuse et que j’en resserrais le lien, je n’ai la conscience ni des heures ni des jours qui s’écoule, je suis resté au pied de cette croix près de laquelle Dieu nous a appelés. Un changement s’est accompli cependant, nous pleurions ensemble et nous voici dispersés. Nous revoyons les lieux où nous fûmes heureux, dont l’enfant chéri qui nous a quitté faisait la joie, le charme, l’intérêt et il semble que nous parcourions une terre dévastée. Je compte sur les prières qu’une charité ami fait monter vers le ciel de la chapelle de Rochecotte. J’ai reçu une admirable lettre du P. Gratry, je la relis, je tâche qu’après m’avoir si profondément touchée, elle donne à mon âme, l’élan dont elle a besoin pour s’élever au-dessus des amertumes de la terre. Cher Monsieur, c’est bien dur de pleurer sur le bonheur perdu de ses enfants ; bonheur pur et chrétien ! On accepterait sa propre souffrance, si du moins on pouvait détourner de ce calice d’amertume. Mais il faut l’accepter tel que Dieu l’envoie. J’espère que l’amie si parfaite dont vous aurez bien voulu être l’interprète, est mieux de santé ; je sais comme son cœur répond au mien ! Je ne manquerai pas de transmettre à mon neveu et à ma nièce vos affectueuses paroles et aussi au duc et à la duchesse de Noailles1 qui sont bien écrasés ! Ils y seront profondément sensibles. Mon mari bien atteint par le coup cruel qui nous frappe tous, est vivement touché de votre souvenir. Il me charge de vous en exprimer la reconnaissance. J’y joins l’assurance de la mienne, Cher Monsieur, celle des sentiments que je vous ai voués. Je vous demande de penser quelquefois à moi.

Molé, Mise de La Ferté Meung

1Paul de Noailles (1801-1885) et son épouse Alice Victurnienne née de Rochechouart-Mortemart (1800-1887).


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «18 septembre 1867», correspondance-falloux [En ligne], Année 1867, CORRESPONDANCES, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, Année 1852-1870, Second Empire,mis à jour le : 08/10/2022