1871 |
18 octobre 1871
Louis Charles Estancelin à Alfred de Falloux
Miromesnil (Paris), 18 octobre [1871]
Cher ancien collègue,
Pardon de n’avoir pas répondu à la chaude, à votre bonne et affectueuse lettre. Mais des voyages, et une affaire gastronomo-politique, qui m’est tombée sur les bras, m’en ont empêché. Vous savez, vous ne savez pas que je suis un des premiers qui dans le parti des légitimistes se disait favorable à la fusion. J’aurais voulu qu’elle fut faite au jour opportun, c’est-à-dire au moment de la défaite de la commune. J’ai été trouver le comte de Paris le jour où on a Paris, et fusillé les otages et lui ai dit : « l’heure est sonnée !!! » un an après on s’est décidé… vous savez le reste. Le parti légitimiste n’a pas oublié mon attitude, et j’ai été bien surpris au milieu de la semaine passée de recevoir à la campagne la nouvelle qu’il m’avait choisi pour présider le banquet du 15. J’ai eu peu d’hésitation, je compris la portée politique de ma présence et de mes paroles et j’acceptais. J’avais été nommé à l’unanimité par les délégués des 20 arrondissements de Paris.
Le lendemain dépêche du secrétaire de la réunion me disant : « malentendu, veuillez me pardonner suite à votre acceptation ». Je me le tins pour dit et restai tranquille chez moi. Quelques heures après nouvelle dépêche : « Considérez comme non avenue la dépêche qui vous a été adressée « on vous attend avec empressement »
Vous sentez que je ne suis pas revenu sur ma résolution de me tenir tranquille : des gens sérieux savent ce qu’ils veulent, et ne sont pas livrés aux petites intrigues de quelque médiocrité jalouse. Ceci, raconté en deux mots, a été l’objet d’une suite infinie de lettres, notes, dépêches etc et a pris mon temps ces derniers jours.
Pardon pour la susceptibilité et la vivacité de l’adeur de la Ligue, c’est un homme de beaucoup de valeur, mais difficile à manier, indé….
Charmé cher et ancien collègue de la bonne fortune qui me fait me rappeler à votre souvenir et agréez l’expression de mes sentiments dévoués et affectueux.
Estancelin
