CECI n'est pas EXECUTE 18 janvier 1876

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18 janvier 1876

Rodolphe Apponyi à Alfred de Falloux

Paris, 18 janvier 1876

Mon très cher ami, moi aussi je vous aurais écrit plus tôt, si j’avais été moins maussade et découragé. Ma convalescence avance bien doucement. On me tient enfermé pendant ces froids, sans air ni exercice, donc sans appétit. Je suis faible et courbaturé, sans être malade, et mal entrain. Heureusement la visite d’Hélène qui nous est arrivée il y a deux jours - mais hélas à peine pour une quinzaine – m’a mis un peu de gaieté dans le cœur. Elle est un vrai rayon de soleil et nous jouissons bien de sa chère présence et de celle de son excellent mari.

Mais j’ai hâte d’arriver au contenu de votre lettre. Orloff1 est venu me voir hier et je la lui ai communiquée. Il ne partage pas vos scrupules pour les fonctions de subrogé tuteur2. Il croit que votre autorité et vos conseils, même de loin, pourront être d’une grande utilité et que la besogne active sera à peu près nulle, les affaires des G[alitzin]. en France étant simples et minimes. Il y a princesse le réserve pour être son cotuteur en Russie, où il y aura en outre une tutelle administrative pour les biens de Russie. Quant à être du conseil de famille, O. ne le refuse pas, si la princesse le désir et y insiste. Il lui en parlera dès qu’elle arrivera, et se montre en général aussi parfaitement disposé qu’on peut le désirer. C’est un excellent homme plein de cœur et de dévouement. Si vous avez d’autres messages à lui faire parvenir, je suis entièrement à vos ordres.

Je trouve que votre ami B3. a fait une bien mauvaise campagne avec sa loi ministérielle avortée, et bien un frère d’Augustin, Nommé Pierre, qui pourrait vous remplacer. Mais O|rloff]. croit que lasa proclamation qui était un coup d’épée dans l’eau, selon mon humble avis. Je crains qu’il ait perdu du terrain dans ces derniers temps et je le regrette, car vous connaissez ma sympathie et mon estime pour cet homme de bien.

Ce qu’on connaît jusqu’à présent des choix des délégués me semble plutôt satisfaisant, surtout en juger par le ton peu jubilant des mauvais journaux. Les campagnes répareront le mal qu’auront fait les villes et il ne serait pas impossible que la partie la plus mauvaise du Sénat fut celle nommée par l’assemblée.

Je suis peiné, mais nullement étonné de vous savoir souffrant par l’horrible temps qu’il fait. Le moyen de se bien porter ou de se remettre dans cette vilaine saison ! ...Ma pauvre Hélène4 a mis 36 heures de plus pour son voyage, ayant été obligé, au lieu de prendre par le Mont-Cenis, de descendre de Turin à gênes, et de nous arriver par la corniche et Marseille.

Alexandre5 qui accomplit demain 19 ses 32 ans, est encore avec nous il ne retourna à Perth6 que pour le carême et verra alors s’il a encore quelque chance de réussite. Il ne me paraît guère y compter, le pauvre garçon et me semble bien découragé !

Répétez-moi, cher ami, que j’aurais encore la joie de vous revoir au printemps avant votre départ définitif. J’ai besoin de cette douce perspective pour me consoler d’une séparation qui me sera bien pénible.

Hommages et souvenirs à votre cher et aimable entourage et pour vous toutes les tendresses de mon cœur.

Rod

1Orlov, Nikolaï Alekseïevitch, comte d’(1827-1885), prince russe. Diplomate et écrivain militaire.

2Il s’agit de la succession d’Augustin Galitzin décédé le 17 décembre 1875.

3Broglie sans doute.

4Hélène Apponyi, princesse de Borghese (1848-1914).

5Alexander Apponyi von Nagy-Appony (1844-1925), son fils, diplomate.

6Ou Pech Ville de Hongrie, à 60 km de Lengyel, demeure des Apponyi.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «18 janvier 1876», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1876,mis à jour le : 15/11/2022