CECI n'est pas EXECUTE 11 septembre 1875

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11 septembre 1875

Ambroise Joubert à Alfred de Falloux

Angers, 11 septembre 1875

Cher Monsieur de Falloux,

Je reçois votre lettre et je partage vos appréhensions, surtout après une conversation que mon frère1 a eu ces jours derniers avec Monsieur Loriol de Barny2 notaire de notre évêque3. Cet estimable homme d'affaires a crû devoir lui dire que l'évêque savait que certaines personnes répandaient d'affreuses calomnies sur la situation faite par l'évêché aux frères de la doctrine chrétienne ; mais qu'il était sur la trace de ses calomniateurs et qu'il avait l'intention de les poursuivre devant les tribunaux et qu'il les confondrait en produisant au grand jour les lettres du supérieur général de Paris, le remerciant de sa sollicitude pour ses frères et des subsides qu'il leur fournissait pour mener leur œuvre à bonne fin. Mon frère sest tu et c'est ce qu'il avait de mieux à faire ; mais ceci indique évidemment un parti pris d’audace que nous ne modifierons pas facilement. Je suis très disposé à donner mon concours en argent au comité qui voudra et pourra prendre en main la direction de l'affaire ; mais je ne puis ni ne veux avoir aucun rapport direct avec notre évêque. Vous voyez donc mon impuissance à le faire sortir de sa silencieuse inertie et il ne faut pas compter sur moi pour vaincre la difficulté présente. Il faut des hommes moins compromis avec Mgr Freppel et je suis tenu à une réserve extrême à son égard, car je suis à l'index je ne veux pas arriver à l'excommunication. Quant à être en garde, soyez assurés que j’y suis de façon à ne subir ni entraînement ni surprise. Je sais que je suis accusé de miner les projets de fondation de l'université, cela m'importe peu, je suis très décidé à ne pas subir une direction que je déplore, et mon plus vif regret est de ne pouvoir donner un concours actif à des entreprises qui seraient excellent, si elles étaient menées avec sagesse ; mais qui seront fatales, conduites d'une façon aussi légère et précipitée. Je ne renonce pas au plaisir d'aller vous voir au Bourg d'Iré, mais Madame Joubert et mes filles ne pourront répondre à l'aimable invitation de Madame de Falloux car nous venons de faire une perte bien cruelle. La fille de mon pauvre beau-frère Alfred Voisin vient de mourir d'une phtisie galopante à 18 ans et demi, elle était mariée depuis deux mois, c'est un affreux malheur, mes filles aînées perdent leur meilleure amie d'enfance et ma pauvre belle-sœur, veuve depuis 18 mois a grand besoin que nous l'entourions dans un pareil moment.

Veuillez, mon cher Monsieur de Falloux, agréer l’expression de mes sentiments dévoués et affectueux ?

Ambroise Joubert

 

1Joubert, Achille (1814-1883), maire d'Angers.

Joubert-Bonnaire, Ambroise (1814-1890), industriel et maire d'Angers (1871-1874). Élu sénateur du Maine-et-Loire en 1876.

2Loriol de Barny, Edouard (1834-1884), notaire à Angers. Maire d’Angers de juillet à décembre 1877. Ayant démissionné, il sera peu après administrateur de la Banque de France.

3Mgr Freppel.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «11 septembre 1875», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1875,mis à jour le : 04/12/2022