1882 |
18 août 1882
Charles d'Héricault à Alfred de Falloux
Tingry1, ce 18 août 1882
Monsieur,
Vous voulez bien me dire que mon article vous satisfait. J’en suis vraiment tout heureux. Après la joie de dire nettement ce qu’on porte, je n’en sais guère de plus grande que de plaire à un homme qu’on admire.
Je serais trop confus d’être devancé par vous, Monsieur. Je pense qu’aussitôt après la St-Hubert, la Révolution me rappellera dans mon grenier parisien. Je vous prie de me permettre de me tenir aux aguets de votre retour à Paris et d’avoir hâte de vous présenter mes respects.
Je me fais une vraie fête de vous écouter. Je me permets même de vous prier de me parler de la Révolution. Je me vis guère que pour l’étudier et la combattre. Vous blâmez-vous de travailler à joindre à ce généreux enthousiasme que vous avez représenté, en compagnon de Montalembert et de Lacordaire, ces haines vigoureuses que la vilenie triomphante est faite pour inspirer ?
De ces anciennes études sur le Moyen-Age où votre illustre ami voulait bien m’encourager – il me reste le souvenir d’une pièce de Rutebeuf2 qui commence avec cette <mot illisible>’ Renars est ors, Renars est vils, Renars Et Renars Regne.
N’est-ce pas la devise de ce temps-ci.
Mais j’abuse de votre bienveillante patience. J’en serai fort fâché. Je vous prie d’agréer l’hommage des sentiments respectueux qui me fait, Monsieur, Votre très humble et dévoué serviteur.
Charles d’Héricault3
1Château de Tingry, département du Pas-de-Calais.
2Poète et écrivain du Moyen-Age, Rutebeuf est l’auteur de Renart, le Bestourné (1261)
3Charles Joseph de Ricault dit d'Héricault (1823-1899), historien et romancier, collaborateur de plusieurs revues et périodiques dont le Correspondant.
