CECI n'est pas EXECUTE 1er décembre 1878

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1er décembre 1878

Jean-Jacques Weiss à Alfred de Falloux

Bruxelles, 1er décembre 1878

Monsieur le comte,

J’avais lu et relu dès son apparition, votre travail de la contre-révolution. Je n’en suis pas moins touché de la gracieuse attention que vous avez eue de m’en envoyer un exemplaire, et je m’empresse de vous en remercier.

Le service que ce travail a rendu est immense. Mais permettez-moi de vous le dire. Il ne portera tous ses fruits, que si, comme vous l’avez annoncé, vous poursuivez la tâche entreprise, et si vous réussissez à grouper autour de vous une phalange d’hommes résolus à ce dégager des solidarités compromettantes.

Ici, nous avons la même lutte que chez vous. Je ne sais si je m’abuse, mais je la crois aussi intense qu’en France. Notre situation est celle-ci : l’immense majorité des catholiques est sincèrement attachée à nos institutions ; ils envoient à la chambre un droit unanime à les défendre et à en vouloir le maintien. Mais d’autre part, les 3/4 au moins de la presse catholique, y sont plus ou moins hostiles ; trois de nos six évêques soutiennent cette presse ; les trois autres s’abstiennent ou n’osent se prononcer, et, sous leur impulsion, l’admirable clergé des congrès de Malines1 est en voie d’oublier les traditions de 1830. Nulle part l’Église n’est aussi libre qu’en Belgique ; enfin de ne pas s’en apercevoir, et l’on s’en va à la poursuite d’un idéal, absolument irréalisable dans les conditions présentes, et dont la défense opiniâtre aliène aux catholiques une foule de bonnes gens.

Il résulte de là que le ministère libéral, arrivé au pouvoir en juin a pu se donner pour programme «  une mission de défense nationale contre l’ultramontanisme » et qu’il entraîne à sa suite des dupes, hélas ! trop nombreux.

Mais j’ai tort de vous parler de notre petit pays. C’est bien plus votre cher <nom illisible> qui mérite de fixer l’attention de tous ceux qui sont soucieux de l’équilibre européen et de l’avenir de l’Église. Le tableau que vous avez tracé fait l’effet d’une lumière se projetant vivement sur les obscurités du présent. Maintenez-la cette lumière, je vous prie, au plus haut point de l’horizon, la victoire est aux persévérants.

Veuillez agréer, Monsieur le comte, avec l’hommage de mon admiration reconnaissante, l’assurance de mes sentiments les plus distingués.

J.J. Weiss

1Malines, en Belgique, fut à diverses reprises, la ville des Congrès catholiques. Falloux participa à certain d’entre eux.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «1er décembre 1878», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1878,mis à jour le : 11/03/2023