CECI n'est pas EXECUTE 7 février 1873

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7 février 1873

Louis-Jules Trochu à Alfred de Falloux

Tours, le 7 février 1873

Mon cher comte,

La brochure1 de Monsieur Dechamps2 vaut tout ce que vous m’en avez dit. Je ne contredirais quant à moi à aucun de ces arguments, comme à aucune de ses vues ou propositions, pas même à ses espérances qui, d’ailleurs, me semblent aussi petites et incertaines que les miennes.

Mais savez vous (comme on dit dans le pays de Monsieur Dechamps) un travail que j’estime supérieure au sien et a tous autres ? C’est « le scepticisme politique » que vous m’avez remis l’autre jour, entre deux portes, comme je prenais congé. C’est un bijou, d’une vigueur de principes, de sentiments, de logique et de concision qui m’ont charmé.

Les points sont sur les i, et jamais le gouvernement personnel républicain ne reçut une plus ferme, plus méritée et plus respectueuse leçon. Mais quoi, il est infaillible ! Et son credo et son syllabus sont autrement autoritaires et étendues que ceux auxquels nous sommes vous et moi soumis.

Ni l’une ni l’autre des 2 brochures n’a envisagé la question de la sanglante bataille, nécessaire et certaine dont je dis (vous savez que j’en rabâche) qu’aucune monarchie dynastique ne pourra porter le poids, surtout la bonne. Le gouvernement anonyme, seul pourra prendre sans risque à <mot illisible> des scélérats qui, ayant assassiné et incendié, ou voulant assassiner et incendier, sont encore un peu partout et se multiplient grâce au système de bascule qui préside à nos tristes affaires.

À présent, obligez moi de demander sans perdre de temps, à notre illustre ami, la confidence très confidente que je vous ai dite. D’après votre sentiment général, je suis résolu à agir. Mais si j’avais par vous, son sentiment spécial sur cette affaire qui est bien plus d’intérêt public que d’intérêt personnel, j’aurais plus d’équilibre et de confiance.

Je suis bien heureux de ce que vous m’avez dit de la petite aurore boréale qui se montre dans les habitudes de santé de notre Dame de Rochecotte3, car c’est une sainte. Dans mon dernier billet qui sentait les affaires (dont j’ai horreur), je n’aurais pas cru séant de lui faire une place. Mais assurez-la bien, je vous en prie, qu’elle n’en a une très grande et très spéciale dans mon cœur et dans mes respects.

Votre ami

1Sans doute s’agit-il de l’article publié dans la Revue Générale, « Le Prince de Bismarck et l'entrevue des trois empereurs », par A. Dechamps, Publication : Braine-le-Comte : impr. de C. Lelong, 1872.

2Dechamps, Adolphe (1807-1875), homme politique belge. Il est alors le leader des catholiques de Belgique. Député de 1834 à 1857 et de 1859 à 1864, il fut également ministre de 1843 à 1847.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «7 février 1873», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1873,mis à jour le : 02/04/2023