CECI n'est pas EXECUTE 15 janvier 1885*

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15 janvier 1885*

Alfred de Falloux à Albert de Rességuier

15 janvier 1885*

Cher ami,

À peine vous avais-je écrit que j’ai reçu une lettre de Mgr Guthlin1, une de M. Rossi2 m’annonçant d’un commun accord que tous les accommodements étaient convenus à ma satisfaction et deviendraient officiellement conclus, aussitôt que l’argent, déjà rendu chez M. Rothschild3 à Paris, serait transmis ou transmissible chez le banquier, son correspondant romain. J’ai envoyé rue Laffitte, la partie de cette lettre qui concernait les affaires et j’ai médité avec Mme de Castellane la partie qui concernait le voyage. Mgr Guthlin tiendrait beaucoup à ce que je parte le plus vite possible. Il dit qu’à partir du 18 février, les audiences deviendront beaucoup plus difficiles à obtenir du Vatican. Il ajoute que l’évêque l’évêque d’Angers4 s’annonce à Rome pour le carême et Mgr Guthlin tiendrait beaucoup à ce que j’arrivasse avant lui. J’accorde peu d’importance à tout cela, parce que je crois peu à l’importance de mon audience du Vatican. J’ai la fatuité de croire que je serais très bien reçu, parce que le contraire serait un acte trop significatif pour les habitudes de ce pays-là, mais je crois rendre justice à tout le monde, à moi-même comme aux autres, en pensant que le bon accueil sera surtout de politesse et n’engagera quoi que ce soit sur le fond des choses. Je vais donc commencer par laisser fondre la neige qui a tombé ici toute une nuit, comme à Paris. Aussitôt que le froid sera momentanément adouci, j’écrirai à Jardry5 pour lui demander un logement à l’hôtel des ministres et pour me placer à votre portée d’aussi près que possible. Je me suis adressé à 3 personnes pour avoir un renseignement précis sur les apparitions dans la rue de Varennes, au duc de Broglie, à Lavedan et à vous. Je réglerai également mon départ d’ici sur le renseignement que j’aurai reçu de Paris, par l’un des 3 intermédiaires sus-nommés. Je voudrais bien ne pas rester à Paris au-delà de 8 jours 1° pour ne pas m’y fatiguer 2° pour entrer dans les convenances de l’abbé Guthlin 3° pour ne pas rentrer à Angers que j’ai pris soin d’éviter au moment des élections sénatoriales, bien que je m’en croie parfaitement à l’abri désormais par l’adoption à peu près unanime désormais de M. Blavier6 dans une réunion de délégués qui comptait plus de 200 personnes. 4° par ce que j’ai hâte d’en finir avec cette corvée romaine. Tous ces 1°, 2°, 3° et 4° ne m’ont pas empêché de réfléchir et Mme de Castellane a beaucoup insisté sur les inconvénients de la saison. Je crois qu’ils seraient tous valables s’il s’agissait de venir de Rome à Paris mais pour aller au contraire de Paris à Rome, on marche toujours vers le soleil et qu’en ne voyageant après tout que dans le mois de février, on satisfait à une légitime prudence.

Là-dessus, cher ami, je vous embrasse de tout mon cœur et je répète à Paul7, que je ne lui aurais jamais fait un plus grand sacrifice qu’en insistant pas pour vous entraîner aussi du côté de l’Italie !

Alfred.

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9 mai 1879*

Cher ami,

Monsieur de Grandlieu1 ayant mis en situation de réclamer la présidence du Conseil et le portefeuille de M. Ferry, je vous arrive avec cette double ambition. Mon intention est aussi de vous confier l’ambassade de Rome et je vous en avertis d’avance pour que vous preniez disposition comme je prends les miennes.

M. Letort2 venu hier pour me féliciter a, en même temps, soigneusement examiné Mme de Caradeuc3. Il la trouve aussi bien que possible dans son état et autorise mon absence pourvu qu’elle ne soit pas longue. Je pars donc demain pour Angers4, j’y ferai rapidement mes affaires et, si Dieu le permet, je vous embrasserai tous avec grande joie dans l’après-midi

de lundi.

Alfred.

 

*Lettre publiée par Gérald Gobbi, Alfred de Falloux et Albert de Rességuier,une amitié dans le siècle. Correspondance 1879-1886, Paris, Société des Écrivains, 2013.

 

1C’est sous ce pseudonyme que Léon Lavedan collaborait au Figaro.

2Médecin de famille des Falloux.

3Belle-mère d’Alfred de Falloux, Mme de Caradeuc de La Chalotais, descendante de Louis-René de Caradeuc de La Chalotais, célèbre procureur général au Parlement de Rennes (1701-1788).

4Depuis le décès de son épouse, Falloux faisait souvent des séjours dans sa maison de l’Impasse des Jacobins, à Angers.

1Guthlin, Joseph (1850-1917), ordonné prêtre en 1871, devenu professeur d'apologétique au Grand Séminaire de Strasbourg (1871), il part en 1878 à Rome pour y faire des études en droit canonique. Docteur en droit canon il devint conseiller de Léon XIII et devint l’informateur des catholiques libéraux auprès du Saint-Siège.

2Rossi, Alessandro (1818-1898), industriel et homme politique italien. Monarchiste et catholique, il fut élu député en 1866 puis sénateur quatre ans plus tard.

3Alphonse de Rothschild (1827-1905), banquier et grand mécène.

4Mgr Freppel.

5Secrétaire et collaborateur de Faloux pour ses écrits.

6Blavier Aimé Étienne (1827-1896), ingénieur et homme politique. Conservateur (orléaniste), maire d'Angers de 1874 à 1876, il fut élu au sénat le 24 janvier 1884 lors de l'élection partielle consécutive au décès d'A. Joubert-Bonnaire, sénateur du Maine-et-Loire, était candidat à sa réélection aux élections sénatoriales du 5 janvier 1885. Réélu, il continuera de siéger avec les conservateurs monarchistes.

7Paul de Rességuier (1813-1889), frère aîné d'Albert de Rességuier.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «15 janvier 1885*», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1885,mis à jour le : 08/08/2023