CECI n'est pas EXECUTE 3 mai 1880

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3 mai 1880

Bernard Chocarne (R.P.) à Alfred de Falloux

Paris, 3 mai 1880,

Monsieur le comte,

J'approuve dès demain votre belle lettre au père Didon1 et je la fais partir pour Corbara. Elle soutiendra le courage de notre cher exilé et le fortifiera dans ce double sentiment de la solidité du terrain où il a placé son apologétique et de l'excellence à tout point de vue de son attitude religieuse. Toutes les lettres de ce cher père sont empreintes de ce souffle ardent sincère, complet et de confiance en la justice de sa cause. Merci, Monsieur le comte, de l'avoir encouragé dans cette double voie. Je pars vendredi pour Flavigny2 afin de travailler au mémoire que les religieux veulent publier avant l'application des décrets. Je n'espère absolument rien pour le présent de notre justification contre la force anti religieuse mais j'en espère beaucoup pour l'avenir et pour la loi sur les associations qui sanctionnera notre travail. J'aurais le regret de ne pas vous voir, Monsieur le comte si vous n'êtes pas à Paris avant vendredi. J'aurais tant aimé causer avec vous du plan de notre mémoire et m'éclairer de vos lumières dans ces questions difficiles et complexes! Voulez-vous avoir la bonté de me laisser savoir votre adresse et jusqu'à quelle époque vous serez à Paris?

Je dois bénir un mariage le 18! Et j'en profiterai pour aller vous voir.

Je sors de la chambre ( interpellation Lamy3). Je suis navré, concerné pour mon pays du courant qui emporte cette chambre de sectaire et de politiciens vers les catastrophes inévitables de la guerre civile et religieuse.

Veuillez agréer, Monsieur le comte, mon très humble et respectueux dévouement.

B. chocarne

 

1Didon Henri Louis Rémy (1840-1900), dominicain. Élève du petit séminaire, il avait pris l'habit dominicain dés 1856. Il avait été ordonné prêtre en 1862. Philosophe, écrivain, un des plus grands prédicateurs à Notre Dame de Paris, il avait été amené peu auparavant à s’exiler au couvent de Corbara (Corse) en 1880 pour cause d’idées par trop libérales et engagées.

2Couvent dominicain de Flavigny sur Orge, en Côte d’Or.

3Lamy Etienne Marie Victor (1845-1919), homme politique. Élu du jura en février 1871, il siégea à la gauche républicaine votant contre la démission de Thiers, puis contre le ministère de Broglie et pour l'amendement Wallon. Réélu en 1876, il fut l'un des 363. catholique, il se sépara de la gauche républicaine lors de la discussion du projet de loi Ferry et vota contre l'article 7. Bon orateur, son discours critique à l'égard de la politique du gouvernement en matière religieuse fut très applaudi par la droite. Non réélu, il se consacra à des travaux littéraires et historiques, collaborant à la Revue des Deux Mondes et au Correspondant dont il deviendra le directeur entre 1904 et 1910.

Le 3 mai, Lamy avait effectivement, à la Chambre, interpellé le gouvernement sur les décrets du 29 mars et du 3 avril 1880 conter les congrégations non autorisées.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «3 mai 1880», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1880,mis à jour le : 19/10/2023