Année 1857 |
21 mars 1857
Victor de Persigny à Alfred de Falloux
Loudun (Vienne), le 21 mars 1857
Cher ami,
Je suis honte de penser que malgré la sincère et profonde affection que vous m'avez inspiré, ma paresse me donne toutes les apparences d'un indifférent. Je reprends aujourd'hui ne fût-ce que quelques mots afin de ne pas retarder plus longtemps l'expression de mes regrets de mon long silence. Soyez assez bon pour me pardonner et dites-vous bien que si je ne vous écris pas comme je le voudrais, je pense en revanche bien souvent à vous.
Votre ami d'Apponyi1 est de retour. Je n'ai fait que le voir un moment. Il m'a paru bien abattu et bien triste. Sa santé a été certainement affecté par cette cruelle perte; je l'ai trouvé bien maigri et bien pâle. Malgré cela il m'a dit qu'il se portait bien. Nous avons pris une grande part à son affliction car nous l'aimons beaucoup. C'est un bien digne homme et un vrai gentleman. Je ne m'étonne pas de l'amitié que vous avez pour lui. Je pense que je le verrai ce soir et je lui ferai part de votre lettre.
Je vois avec peine que vous souffrez des yeux. Comme j'ai beaucoup souffert de cet organe je vous rappelle que le seul remède c'est le repos et l'exercice à l'air.
Je regrette bien de ne pas être à Paris pour vous entendre2.
Adieu à la hâte car l'heure de la Poste me force de terminer cette lettre.
Je dirai à d'Apponi de ne pas tarder à vous donner de ses nouvelles.
Ma femme vous envoie toutes ses amitiés ainsi qu'à Madame de Falloux. Ne nous oubliez pas non plus auprès de Loyde.
Mille compliments de cœur.
F de Persigny
1Sans doute Apponyi, Rodolphe II (1812-1876), diplomate. Il fut ambassadeur à Londres de 1856 à 1871 et de 1872 à sa mort.
2Falloux devait se rendre à l’Académie française pour y prononcer son discours de réception.
