CECI n'est pas EXECUTE 22 juin 1862

Année 1862 |

22 juin 1862

Alfred de Falloux à Victor de Persigny

Dimanche 22 [ juin 1862]

Cher ami,

Rességuier n’a pas manqué de me transmettre vos bonnes et sympathiques tendresses, et je vous en aurais remercier plus tôt sans notre double séparation. Lui a été soudainement appelé à Toulouse par une maladie grave de son père1; c’est là que votre lettre a du le suivre, et de là qu’elle m’est revenue en Anjou où je suis venu prendre quelques jours de repos qui pouvait m’être le plus doux et le plus efficace. C’est vous dire déjà que j’ai laissé ma pauvre malade en pleine convalescence et que les médecins m’ont garantie toute sécurité. Les grands chagrins ont cela de bon qu’ils absorbent, non les petits, mais les moindres. La cruelle inquiétude que j’ai éprouvée durant plusieurs jours pour la vie de sa mère m’a fait considérer comme une rançon presque naturelle la mort de sa petite créature qui venait de monter au ciel, et toutes les impressions tenant aux espérances de la terre se sont effacées devant celle là. Aujourd’hui je n’ai plus dans le cœur que de sincères actions de grâce envers Dieu et une reconnaissance bien émue pour ses amis qui se sont unis à mes premières angoisses. Aussi, cher ami, vous fais-je en même temps qu’à Rodolphe les honneurs du premier courrier que je fasse partir du Bourg d’Iré. Vous reconnaîtrez à l’écriture étrangère que mes yeux sont toujours dans le même état ; par ailleurs je ne me plains plus de ma santé, et j’ai été enchanté ; tout l’hiver, du grand air et des belles promenades de Versailles.

Je ne vous dis rien de la politique, vous êtes bien sûr que ce n’est pas faute d’y penser, et si j’ai le bonheur de vous revoir ce printemps, comme Rességuier me le fait espérer de votre part, je me dédommagerai en attendant, je fais bien des veux pour que votre action personnelle ne vous prépare jamais un regret et pour que notre pays ne reçoive pas un jouir le contre temps de son action extérieure ; mais croyez bien aussi que je me rends compte des difficultés et que je n’ai pas cessé de déplorer depuis plusieurs années, de votre côté, des fautes qui ont rendu possible ou plus facile ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Je présume être de retour à Versailles aux premiers jours de mai, dés que vous arriverez à Paris ; faites-le moi dire, et combinons un revoir certain. Vous savez que ma confiance dans votre cœur et le dévouement du mien pour tout ce qui est vous et votre <mot illisible> inaltérables. Merci, merci encore, cher ami, mettez-moi aux pieds de Madame de Persigny2, prononcez quelquefois mon nom à votre fils ; je vous embrasse de tout cœur.

Falloux

1Alors gravement malade, son père, le poète Jules de Rességuier (1788-1862) devait décéder le 7 septembre 1862.

2Eglé Albine Maria Napoléone, duchesse de Persigny, née Ney de la Moskowa (1832-1890). Petite fille du Maréchal Ney, elle avait épousé le duc de Persigny en 1852.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «22 juin 1862», correspondance-falloux [En ligne], Année 1852-1870, Second Empire, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1862,mis à jour le : 24/12/2023