CECI n'est pas EXECUTE 20 novembre 1854

Année 1854 |

20 novembre 1854

Louis Molé à Alfred de Falloux

Champlâtreux, 20 novembre 1854

Très cher ancien collègue, voici une réponse que me fait Mr. Pasquier et que je crois utile de porter assez promptement à votre connaissance. Cousin auquel j'avais écrit en même temps ne m'a point répondu. Je ne vous envoie pas la lettre de Salvandy parce qu'elle embrase beaucoup d'autres sujets mais elle est ardente pour votre succès. Il avait vu aux obsèques du pauvre S[ain]te Aulaire Mr. Vitet1 et il l'avait trouvé on ne peut plus favorable. Vous remarquerez dans la lettre de Mr Pasquier le personnage qu'il ne nomme pas et qui serait plus que redoutable. Vous aurez certainement compris que c'est le duc de Cousin. Je vais bien examiner s'il serait pour moi d'une bonne conduite d'en écrire à Mr. Guizot. Je suis persuadé que le dit personnage résiste aux instances de nos secrets et dangereux adversaires. Je le connais assez pour être sûr qu'il ne se prêtera jamais à une intrigue ni à devenir l'instrument non le chef d'une cotterie [sic]. Savez-vous que je ne suis pas loin de croire que vous ne feriez pas mal de venir passer plus tôt que plus tard quatre ou cinq jours à Paris ; vous verriez Mr. Thiers, Mr. Cousin, Mr. Mignet2 surtout Mr. Villemain et d'autres encore. Il pourrait être pressant de faire prendre des engagements sans laisser le temps d'ourdir et de former un plan de campagne. Je vous demanderais avant tout de me donner ici quelques moments et de ne voir absolument personne avant de m'avoir entendu et de vous être abouché avec moi. Cela vous dérangera je le sais bien mais le succès pourrait être à ce prix. Je ne dirais pas que je vous attends et autour de vous vous ne diriez pas que vous venez me voir. Mon sentiment est que nous réussirons si nous faisons tout ce qu'il faut pour réussir sinon, non ; car il y aura de l'opposition et il vaut mieux la prévenir que la combattre, la conjurer par nos efforts que de la laisser se grossir par notre inaction.Je vous ai dit que j'avais plus envie que vous-même d'atteindre le but, je vous le prouve presque jusqu'à l'importunité.

Vale et me amo.

Molé

P.S. Je penserai à Mr. Viennet3   

Notes

1Vitet, Louis-Ludovic (1802-1873). Ancien élève de l’École Normale Supérieure, il collabora au Globe et publia divers ouvrages. Élu député de Bolbec (1834), il devint vice-président du Conseil d’État. Le 8 mai 1845, il entra à l’Académie française. Député à la Législative, il siégea avec la droite monarchiste. Il se retira dans la vie privée après le coup d’État. En 1871, il se fit élire à l’Assemblée Nationale. Il publia plusieurs ouvrages dont, De l’état actuel du christianisme en France, en 1867.
2Mignet, François-Auguste (1796-1884), journaliste et historien. Il avait collaboré avec Thiers au National (1829-1830). Auteur de divers ouvrages d’histoire dont une Histoire de la Révolution française (1824). Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences morales et politiques où il siégeait depuis 1832, il était entré à l'Académie française en 1837. Conseiller d’État, il était collaborateur de plusieurs journaux.
3Viennet, Jean Pons Guillaume (1777-1868), auteur dramatique et homme politique. Membre de l'Académie française depuis 1830. Après avoir commencé une carrière militaire, dans la marine, il entra en politique. Député sous la Restauration, il contribua à l’avènement de la monarchie de Juillet. Depuis 1848, il s'était retiré d la vie politiqu.

Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «20 novembre 1854», correspondance-falloux [En ligne], Année 1852-1870, Second Empire, Année 1854, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES,mis à jour le : 07/10/2013