Année 1864 |
24 octobre 1864
Lucien-Anatole Prévost-Paradol à Alfred de Falloux
Paris, lundi 24 [octobre 1864]1
Monsieur,
Votre lettre que je trouve ce matin en revenant à Paris, me récompense bien amplement du peu que j'ai pu faire pour rendre hommage à la noble mémoire du père Lacordaire. Je tenais surtout, après l'injuste jugement porté dans le Journal des Débats sur l'admirable discours de M. Dupanloup, à exprimer une fois de plus ma sympathie pour le catholicisme libéral et pour ceux de ses représentants qui sont restés comme le Père Lacordaire et comme vous fidèles à la pensée de toute leur vie. Si l'ambition était permise dans le temps où nous vivons, la mienne serait de signer un jour avec vous un vrai traité de paix entre l’Église et l'État, fondé sur la liberté, et mettant la dignité morale de l’Église affranchi au-dessus du choc de nos révolutions. Ces belles choses se feront un jour par d'autres que par nous quand cette triste « lune » comme l'appelait Lacordaire aura passé. Ce que nous pouvons faire de notre vivant, c'est de nous comprendre et de nous encourager les uns les autres ; et laissez-moi vous dire à ce propos que si je suis confus et sincèrement embarrassé quand vous parlez d'admiration pour mais très imparfait écrit, je suis heureux et fier lorsque vous voulez bien vous dire mon ami. Veuillez offrir mes respectueux remerciements à Madame de Falloux et au prince Galitzin qui a eu la bonté de me lire.
1La date nous est donnée par l'allusion au discours de Dupanloup sur le P. Lacordaire. Prévost-Paradol avait par ailleurs écrit dans le Journal des Débats du 18 octobre 1864, un long compte rendu élogieux de la Correspondance de Lacordaire que venait de publier Falloux (Correspondance du R. P. Lacordaire et de Mme Swetchine, Paris, Didier, 1864, 584 p.)
