1871 |
31 mars 1871
Alfred de Falloux à Jules de Bertou
Bourg d'Iré, 31 mars 1871
Cher ami,
Votre lettre d'hier nous fait espérer que l'évêque1 a pu quitter Tours, et j'en suis bien heureux pour sa santé, comme pour la nôtre, car il me paraissait disposer avoir des conversations fort utiles avec M. Thiers. Je vous trouve un peu trop sévère pour l'Assemblée, qui je le crois, ne songe point à Rennes et qui n'a sous la main qu'une armée bien douteuse, si l'on s'en rapporte à Fit-James2 et à son éclaireur, Stanislas de la B3. Les départements, au point de vue militaire, ne sont pas non plus brillants à cette heure-ci. Tout le monde est éreinté et se cramponne à quelques instants de repos. C'est mal raisonné, même au point de vue du repos, mais ne voyons-nous pas sans cesse et partout bien des appétits irréfléchis l'emporter sur le raisonnement ? J'attends toujours avec bien de l'impatience des nouvelles qui ne m'arrivent point avec clarté sur les résolutions princières. Il me semble que c'est toujours le même cercle se vicieux. Marie voudrait bien écrire à Madame de Castellane et à Madeleine4, mais l'irritation se porte maintenant sur les yeux : elle en souffre beaucoup et ne peut plus en faire aucun usage. Loyde a un peu de répit dans ses dents, mais bien de la fatigue de tout ce qu'elle a souffert. Ma petite poudre opère encore et m'a permis de me lever ce matin après quelque hésitation.
Ne m'oubliez pas dans vos réponses aux Lambel5.
Alfred
1L'évêque d'Orléans, Mgr Dupanloup.
2Fitz-James, Édouard, Antoine, Sidoine de (1828-1906), propriétaire du château de la Lorie, près de Segré, en Maine-et-Loire, et donc voisin de Falloux auquel il était lié d'amitié.
3Sans doute Blacas d'Aulps, Stanislas Pierre Joseph Yves Marie de, comte de Blacas (1818-1887), homme politique. Il est le représentant du comte de Chambord en France.
4Madeleine de Castellane (1847-1934), née Leclerc de Juigné ; elle était, depuis le 3 avril 1866, l'épouse d'Antoine de Castellane.
5Lambel, Alexandre de (1814-1903), grand propriétaire lorrain, ce proche d'A. de Melun et de Jules de Bertou a contribué, aux côtés d'A. de Melun, au développement des œuvres du catholicisme social, à Paris notamment, où, dés 1838, il avait fondé le Patronage de Saint-Jean.
