CECI n'est pas EXECUTE 29 septembre 1879

1879 |

29 septembre 1879

Eugène Regnault à Alfred de Falloux

Chartres le 29 septembre 1878

Monsieur le comte,

Permettez-moi de vous exprimer la peine que j’ai ressentie à la lecture de votre récente lettre insérée dans les journaux. Évidemment le discours1 de M. de Mun et les termes dont il s’est servi sera porté dans le sens naturel à la guerre déclarée à l’Église par M. G2. C’est contre cette nouvelle révolution qui imprime déjà la terreur et paralyse les gens de bien qui peut devenir bientôt sanglante puisque le discours de Romans3 appelle l’amnistie4 contre ces misérables qui ont couvert par de ruines et de sang, en un mot c’est contre cette levée de boucherie, cette recrudescence de l’esprit missionnaire que M. de Mun a voulu réagir avec force et intrépidité.

Ce qui m’attriste, Monsieur le comte, c’est encore la dissidence qui peut s’élever à l’occasion de votre lettre dans le camp des catholiques. Dans ce moment l’Église est forte et puissante, parce qu’elle est unie ; mais si des querelles s’élevaient entre les catholiques nos ennemis révolutionnaires du jour en triompheraient.

Je ne sais si vous vous souvenez des lettres que j’ai écrites en novembre 1856 au sujet de la polémique entre les journaux religieux. Elles ont été imprimées dans le Correspondant. Elles contenaient à votre endroit indiscrètement un éloge mérité, je dirais même une justice rendue. Je disais que l’Église est quelquefois plus éprouvée par le dissentiment de ses enfants que par les attaques qui viennent du dehors.

Je souhaite bien vivement, Monsieur le comte, que les choses en restent là et qu’aucune polémique ne s’engage.

Votre amour pour la religion, votre générosité, l’élévation de vos vues vous porteront à affermir le seul bien presque qui nous reste en ces temps mauvais, la paix et l’union entre les catholiques.

Je vous prie, Monsieur le comte, d’agréer tous mes sentiments de haute estime est très dévoués.

 

L. Eugène évêque de Chartres (Mgr Regnault5)

 

P. S.

Je vous communique deux lettres que j’ai écrites récemment au Ministre des cultes6.

 

 

1Il s’agit du discours prononcé par A. de Mun à Chartres, le 8 septembre 1878 dans lequel il proclamait que le terrain sur lequel les catholiques devaient se réunir était celui de la « Contre-révolution ».

3Allusion au grand discours programme de Léon Gambetta prononcé à Romans le 18 septembre 1878.

4Il s’agit de l’amnistie des Communards.

5Regnault, Louis Eugène (1800-1889), évêque de Chartres de 1853 à sa mort.

6Charles Lepère (1823-1885). Il fut ministre des Cultes du 4 mars 1879 au 17 mai 1880.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «29 septembre 1879», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1879,mis à jour le : 16/06/2021