CECI n'est pas EXECUTE 27 octobre 1878

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27 octobre 1878

Arthur de Cumont à Alfred de Falloux

L’Épinay1, 27 octobre 1878

Cher ami, votre réponse est superbe. Qu’elle soit sans effet sur les radicaux blancs et les radicaux rouges, c’est probable. Qu’elle ne touche point les seconds et ne convertisse pas les premiers, je l’accorde et suis volontiers du sentiment de ceux qui le disent. Mais comme vous n’avez eu, que je sache, ni cette intention, ni cette prétention, ni cette espérance ; comme vous ne vous adressez ni aux sourds ni aux aveugles, ni aux coquins, ni aux imbéciles ni aux gens de parti pris ; comme votre unique but est de rassurer, de calmer, d’éclairer, de rapprocher cette masse d’hommes de bon sens et de bonne foi auxquels Gambetta répugne et que M. de Mun effraie, loin de conclure avec ses amis timorés, auquel vous faites allusion à l’inutilité de vos déclarations de vos explications, j’affirme qu’elles ne furent jamais plus opportunes que jamais plus nécessaire, jamais plus commandées par le devoir et la conscience à ceux qui comme vous, cher ami possèdent la triple autorité du caractère, de l’expérience et du talent. Il est impossible d’être plus spirituel plus incisif, plus la plus claire, plus grave que vous l’avez été dans ces pages où l’on ne saurait soutenir des idées plus justes, défendre des vérités plus importantes, mieux servir son pays et sa cause dans un style plus entraînant. L’orgueil refusera de se rendre ; la sottise l’envie, la bassesse, fanatismes vont s’unir pour vous insulter. Quant à trouver des arguments d’une valeur quelconque, quand à vous opposer une seule raison sérieuse, je leur en porte le défi. Sans doute votre thèse est attaquable, et la preuve est qu’on l’attaquera ! Mais allez irréfutable, et la preuve et qu’on ne la réfute rapport. Je suis donc d’accord avec vous sur tous les points sur le fond comme sur la forme. J’admire beaucoup votre éloquente et victorieuse réponse à vos contradicteurs. J’admire plus encore l’intrépidité chrétienne, royaliste et patriotique avec laquelle vous l’avez faite. Si vous y attachez quelques prix, voilà mon opinion, l’opinion d’un vieil ami qui vous gardera jusqu’au dernier jour l’amitié la plus tendre et la plus fidèle, sans aliéner jamais l’indépendance de ses jugements.

J’arrive à la fois d’Orléans et de Rochecotte, mais vous savez déjà tout par vos exacts correspondants, et je n’ai plus rien à vous apprendre. Ainsi vous connaissez certainement les faits et gestes de Mgr Freppel, le vrai but de sa présence aux obsèques, et le personnage chez lequel il a pris gîte, et l’autre personnage qu’il a eu l’audace, l’impudence et l’impudeur de prendre pour acolyte pendant le défilé du cortège. Il a reçu d’ailleurs de ses collègues présents à la cérémonie un accueil plus que frais, et ses chances seraient légères si pour entrer au Sénat il devait compter sur leurs suffrages.

Votre absence a causé les plus vifs regrets mais nous n’avions pas besoin d’insister pour que chacun comprit les vôtres.

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse et suis a vous de tout cœur, de toute âme, et plus étroitement que jamais.

A. de Cumont

 

1Château de l’Épinay, domaine d’Arthur de Cumont, à Saint-Georges sur Loire (Maine-et-Loire).


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «27 octobre 1878», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1878,mis à jour le : 24/04/2021