1871 |
20 décembre 1871
Louis de Carné à Alfred de Falloux
Quimper, 20 décembre [1871]
Mon cher ami, après un séjour de trois semaines à Paris, j’en ai été forcément rappelé par l’impérieux devoir de venir ici et présider notre commission permanente du conseil général et en le quittant j’ai fait après cette escale à l’académie. J’en repartirai le lendemain de Noël pour être à Paris le 27 au matin.
L’affaire Littré1 qui émeut si justement évêque d’Orléans2 était à mon départ déjà engagé et à moins que la présence de M. Guizot rentré le 18 n’ait changé l’état des choses, il est fort à craindre que cette nomination ne soit inévitable. J’avais eu quelques jours avant un débat personnel violent à l’occasion du prix proposé pour <deux mots illisibles> et j’ai été assez heureux pour concourir à empêcher le scandale. Puisse le ciel que ce ne soit pas notre dernière victoire !
Une candidature <nom illisible> contre Monsieur Littré me paraissant à peu près impossible, du moins dans l’état où j’avais laissé les choses, il m’avait semblé que la meilleure guerre à faire était celle des bulletins blancs. Cet avis m’a paru partagé par plusieurs membres que l’on rallierait difficilement sur un même nom propre, mais qui seront heureux de faire une protestation et celle-ci pourrait être très <mot illisible>. Si d’ailleurs l’évêque d’Orléans est à Paris, et que vous m’y précédiez de quelques jours, vous jugerez de la situation et je profiterai à mon arrivée de tout ce que vous aurez appris comme de tout ce que vous aurez fait.
Louis Carné
1Émile Maximilien Paul Littré (1801-1881), lexicographe, philosophe et homme politique. Célèbre pour son Dictionnaire de la langue française, sa candidature en 1963 fut âprement combattue par Mgr Dupanloup qui lui reprochait son athéisme. Il sera néanmoins élu le 30 décembre 1871, ce qui avait amener Mgr Dupanloup à donner sa démission en signe de protestation.
2Mgr Dupanloup. L’évêque menaçait alors de démissionner de l’Académie si Littré y était élu.
