CECI n'est pas EXECUTE 13 avril 1864

Année 1864 |

13 avril 1864

Bernard Chocarne (R.P.) à Alfred de Falloux

Sainte-Baume (Var), 13 avril 1864

Monsieur le comte,

J'ai reçu à Marseille il y a déjà quelques jours le volume de la correspondance du Père Lacordaire avec Madame Swetchine1 que vous avez eu la bonté de m'envoyer. J'ai été bien sensible à cette attention de votre part, et n'eut été le travail de la fin du carême j'aurais déjà dévoré ce volume. Je n'ai pu lire encore que les premières années, mais comment ne pas vous dire tout de suite l'effet de cette lecture sur moi? Je suis ravi de tout ce que j'ai lu sur le Père Lacordaire ou de lui-même, rien ne m'a fait une pareille impression : ces lettres, c'est lui-même, c'est son portrait fidèle avec les lumières et les ombres faits par lui et sans prétention ni arrière-pensée et, je le répète rien n'est comparable à l'impression que produit sur moi cette âme qui s'ouvre devant l’amitié, à tous les replis les plus intimes, les plus profonds. Cette peinture si vraie d'une âme si grande et si belle arrache des larmes, et je ne dois pas être le seul à éprouver ce sentiment. Ah! Qu'ils sont à plaindre les hommes qui en présence d'un tel caractère ainsi mis à nu ont encore le triste courage de dénigrer et d'accuser!

Si je pouvais éprouver un regret devant cette admirable publication ce serait d'avoir entrepris de raconter un côté de cette grande vie. La vraie biographie la voilà, elle est là tout entière, et ni le talent ni la piété filiale ne diront rien qui approche de cela.

Je suis pourtant dans la solitude depuis hier pour essayer d'achever mon travail commencé. L'aurais- je entrepris si j'avais connu ces lettres?

J'en doute. Au moins aurais-je en elles le guide le plus sûr et un exemplaire d'une perfection désespérante.

Ce livre pouvait venir à toute heure car il est de ceux sur lesquels le temps ne peut rien que les grandir; mais pouvait-il venir plus à propos qu'au moment où l'on parle de la condamnation des idées qui ont été l'âme et le drapeau du Père Lacordaire? À tous ces points de vue donc, ce livre est un des plus grands services rendus à la mémoire du Père Lacordaire. Permettez-moi, Monsieur, de vous en remercier de cœur. 

Et veuillez agréer l'hommage du très profond respect et de vive gratitude sur lequel j'ai l'honneur d'être monsieur le comte votre très obligé serviteur.

Bernard Chocarne

 

1Correspondance du R P. Lacordaire et de Madame Swetchine, publiée par le comte de Falloux, Paris, Librairie Didier, 1864.


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «13 avril 1864», correspondance-falloux [En ligne], Second Empire, Année 1852-1870, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, Année 1864,mis à jour le : 19/10/2023