CECI n'est pas EXECUTE 21 septembre 1882

1882 |

21 septembre 1882

Bernard Chocarne (R.P.) à Alfred de Falloux

Volders près Hall Tyrol Autriche

21 septembre 1882 ;

Monsieur le comte, Mme de Prailly1 m'a laissé par testament la correspondance du Père Lacordaire avec mission de la publier2. Je la relis en ce moment dans cette pensée. Je vous demande la permission de vous soumettre un scrupule.

À propos de la loi de 1850, il y a 2 lettres fort vives dont vous trouverez la copie ci-jointe. Puis-je me permettre de les supprimer ?

Ces lettres ne sont pas seulement sévères elles sont injustes et pour la loi elle-même et pour les hommes qui l'ont faite. Sans doute le père Lacordaire à porté sur cette même loi et sur ses auteurs un tout autre jugement sur son lit de mort, dans son testament, sans doute de cette page éloquente ou la loi de 1850 est comparé à l'édit de Nantes, accompagnerait en note la publication des lettres du 28 février et du 26 mars 1850. Mais suffirait-elle à couvrir leur vivacité et à les amnistier?
Car vous le comprenez, Monsieur le comte, mon scrupule est bien moins à votre endroit qu'en ce qui concerne la mémoire du Père Lacordaire. Ce n'est pas vous ni vos amis qui sont atteints par cette publication, c'est lui.

Est-il maintenant permis, est-il délicat et loyal de surprendre de pareil épanchement confié à l'amitié sans aucune prévision de publicité ultérieure, formellement désavoué plus tard dans un écrit authentique, et d'initier ainsi le public à des secrets qui ne le regardent nullement, et contre les intentions raisonnablement présumées de l'auteur ? Je ne le crois pas. Vous avez dû monsieur le comte vous trouver dans la correspondance de Madame Swetchine en présence de pareils coups de ciseaux à donner et je vous serai reconnaissant si vous voulez bien me dire la règle suivie par vous en pareil occurrence.

Cette correspondance de Mme de Prailly est fort belle. En la relisant je revis mes anciennes l'année d'avant 1860: cela console de la triste époque que nous traversons.

Veuillez agréer, Monsieur le comte, l’hommage des sentiments de très profond respect avec lesquels j'ai l'honneur d'être votre très humble et dévoué serviteur.

Chocran

1Hortense Pauline Husson de Prailly (1813-1879).

2Ces Lettres Du R. P. Lacordaire À Mme La Baronne De Prailly seront publiées en 1885.


 


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «21 septembre 1882», correspondance-falloux [En ligne], Troisième République, BIOGRAPHIE & CORRESPONDANCES, CORRESPONDANCES, 1882,mis à jour le : 19/10/2023