1871 |
11 octobre 1871
Alfred de Falloux à Pauline de Castellane
11 octobre 1871
Chère Madame,
Nous apprenons tous avec grand chagrin, y compris Mme de Nétumières1, les cruelles souffrances de Bertou, et nous nous plaisons à espérer, du moins qu'elles auront cessé quand notre vive condoléance lui arrivera. Nous sommes dans un lieu aussi paisible que magnifique ; les grandes proportions, les grosses murailles de granit sont d'un excellent régime pour la névralgie, et en y ajoutant la polynia, dont je n'use plus que très rarement, depuis le tour qu'elle m'a joué l'année dernière, je suis parvenu à me tenir sur mes jambes ces deux jours-ci. Demain, nous nous remettons en route, Marie et Loyde pur Ste Anne, moi pour Rennes, où j'ai quelques affaires ; tout est combiné pour rentrer au Bourg d'Iré samedi si le bon Dieu ne nous envoie pas d'obstacle imprévu. Je n'ai encore aucune nouvelle des élections2 de Maine-et-Loire. Dans l'Ille-et-Vilaine, les bonnes l'emportent beaucoup sur les mauvaises ; à Rennes même, deux très bons conservateurs sont nommés et un seul radical, mais les deux gendres3 de Mme de Nétumières sont à peu près hors de combat. L'un est remis au ballottage pour dimanche prochain, et l'autre, sans que nous en soyons absolument sûrs, a perdu la partie d'une centaine de voix. Dans ces deux cantons, la lutte n'était que entre deux bons choix4, la défaite n'a par conséquent aucun inconvénient politique. Quant à l'ensemble de la lutte, il s'est fait partout sur le drapeau blanc et le drapeau tricolore ; les proclamations des candidats opposants étaient imprimées sur des affiches tricolores, placardées en profusion.
Je suis bien charmé des bonnes nouvelles du Cantal5, et j'attends avec impatience celles de Touraine, car il est toujours bien important dans ces temps-ci, de savoir par qui l'on est entouré. Une lettre de Henri d'Armaillé6 me dit que Fitz-James7 a beaucoup désiré la candidature au Lion d’Angers, à la place de M. d'Andigné8 qui n'avait manqué l'élection que de quelques voix, il y a trois ans, mais n'a point accueilli son désir, et on lui a préféré un tout jeune Léonce de Terves9, ce qui lui cause de nouveau irritation et chagrin.
Je ne vous dis rien, chère Madame, de la politique générale puisque, hélas ! Il <six> ne subit d'autres modifications que celles imposées par la mort subite. Cela fera-t-il réfléchir M. Thiers, et choisira-t-il le successeur de M. Lambrecht10 en songeant que lui-même n'est qu'un mortel ?
Je vais écrire à l'évêque d'Orléans dans le sens que vous m'indiquez. Une grande et belle maison que j'avais espérée à Angers, n'est pas disponible, mais nous avons plusieurs amis qui veulent bien se mettre en nouvelle recherche. En attendant, je travaille, aussi activement que je le puis, aux dernières petites modifications de Mme Swetchine, pour être absolument prêt à la correction des épreuves dans les termes exigés par M. Glorian. Bertou a-t-il une réponse de M. Nicolas11? A-t-il pu retravailler le chapitre Lacordaire12. Veuillez prononcer mon nom à la Princesse Czartoriska13, et aussi à Mme de La Ferté14, quand vous lui écrirez. Mme de Caradeuc15, Marie et Loyde sont arrivées ici bien fatiguées ; leur séjour ici leur fait plaisir et [mot illisible].
Au revoir tout prochain, chère Madame.
Alfred